A l'aube de nouveaux horizons

Je pourrais paraphraser Sonia, 14 ans [1], pour présenter le dernier essai de Nathalie Cabrol, "A l'aube de nouveaux horizons", paru aujourd'hui [2] : 

Bonjour, 

Vous souhaitez vous sortir de votre quotidien morose ? 

Vous souhaitez partir à l'aventure et faire un voyage exceptionnel ?

Alors dans ce cas, prenez "A l'aube de nouveaux horizons" et... allez à la première page. Vous direz alors "Que l'aventure commence !"


En ces quelques phrases, tout est dit. Comme le voyage extraordinaire de Sonia [1], il s'agit d'une creepypasta, c'est-à-dire d'un récit effrayant ou plutôt qui pourrait se transformer en histoire d'horreur si nous continuons sur la mauvaise trajectoire. 

J'ai eu le privilège de recevoir le livre le 24 décembre en échange d'une critique sur le site Babelio [3]. Au lieu de la recopier ou de l'étoffer ici, je vais raconter ce qu'il y a de l'autre côté du miroir, ou pourquoi cet exercice scolaire était un grand pas pour moi. 

Masse critique privilégiée

Quand Nathalie A. Cabrol a annoncé sur Twitter, le 8 décembre 2022 [4], la sortie d'un nouvel essai le 8 janvier 2023, je me suis dit que ma patience allait être mise à rude épreuve, tout en me réjouissant que ce soit une opportunité d'entendre parler de SETI dans l'émission Quotidien sur TMC ou 28 minutes sur Arte, où les questions étaient bien plus pertinentes [5].   

Or, le 19 décembre, j'ai reçu un email avec pour sujet : "Babelio Masse Critique privilégiée : recevez un essai sur la vie dans l'espace en échange d'une critique". J'ai de suite rempli le formulaire disant que j'acceptais de participer. Le lendemain, j'ai reçu un mail avec pour sujet "Babelio : vous remportez un essai sur l'exploration spatiale dans le cadre d'une Masse Critique privilégiée".

J'ai reçu le cadeau le 24 décembre, posté directement par la maison d'édition : Le Seuil, que je remercie ainsi que Babelio. 

Cadeau de Noël 2022

J'ignorais qu'il existait des masses critiques privilégiées. J'avais déjà participé à des opérations "Masse critique" avec Sonia. Quand l'annonce était faite, on allait sur le site et on cochait chacune les livres susceptibles de nous intéresser, dans une liste généralement assez longue. Si jamais on remportait un livre, c'était celle de nous deux qui l'avait choisie qui rédigeait la critique. Je me souviens des éclats de rire avec "Le pirate qui ne connaissait pas la valeur de Pi" d'Eugène Ostashevsky [6]. Sonia avait remporté "Le bois de Coin Joli : La grosse colère" [7].

Juste après son décès, je me suis rendue compte qu'il m'était impossible d'ouvrir un livre sans que le monstre qu'est le deuil vienne perturber ma lecture [8], souvent de manière agréable en réveillant des souvenirs [9], de temps en temps en apportant des réponses aux "Et si..." [10]

A chaque fois que je parlais d'un livre sur ce blog, je me suis imposée de le faire aussi sur Babelio, en copiant-collant quelques phrases plus ou moins banales, qui n'avaient pas été dictées par le deuil. Peu convaincue de l'existence de la résilience, je me disais que ça me servirait de baromètre. Par exemple, le billet de blog du premier livre que j'ai lu après le décès de Sonia, à savoir "Une minute quarante neuf secondes" de Riss, comporte 1095 mots. Je n'ai pu en tirer que 106 mots pour Babelio. 

Si l'on m'a proposé de participer à cette masse critique privilégiée, c'est sans doute parce que j'ai publié une critique du précédent ouvrage de Nathalie A. Cabrol [11], après en avoir parlé ici [12]. J'ai pu utiliser 263 mots des 1169 que comporte le billet de blog, pour la critique et les 2 citations. La résilience aurait-elle plus que doublé en 16 mois ? 

Marque-pages

J'ai donc parcouru avec grand plaisir le livre, en mettant des post-it à chaque passage qui pourrait faire l'objet d'une citation à copier sur Babelio ou à utiliser pour la critique à rédiger [3]. L'essai est tellement riche, que la quantité a impressionné M, 15 ans. Elle m'a promis de lire le livre en mettant aussi des marque-pages afin que l'on puisse comparer. 


Comme je n'allais pas recopier plus de 50 extraits sur Babelio, ni parler de tout ce qui m'a enthousiasmée, j'ai axé l'exercice littéraire sur la recherche de signatures technologiques. Le premier post-it que je n'ai pas utilisé correspond à ce passage, page 17, où il est question d'une conférence en décembre 2016 dédiée à la remise d'un prix en hommage à "Carl Sagan" :

En guise d'introduction à cette conférence, je décidai donc de parler de notre rencontre de 1986, de l'importance de Carl dans ma vie, mais aussi de la façon dont il continue étrangement de l'influencer même si longtemps après sa mort. Au cours de notre brève rencontre à Paris, il m'avait parlé avec passion de la recherche de vie dans l'univers, de résilience, de ne jamais laisser personne dicter ce que je pouvais faire ou qui je pouvais devenir. 

Le dernier passage que j'ai souligné est page 331, dans le chapitre 13, que j'ai ressenti un peu comme un coup gagnant à une partie d'échec ou dans une compétition sportive.  En rédigeant la critique pour Babelio, j'ai hésité à masquer le passage sur ce dernier chapitre, un peu comme si je révélais l'intrigue d'un roman, si je brisais le charme en dévoilant où Nathalie A. Cabrol nous promène avec intelligence.  

Il n'est encore écrit nulle part que nous échouerons mais le temps presse. Et nous ne devons pas opposer l'attention que notre planète demande avec nos aspirations à atteindre les étoiles, car elles s'alimentent mutuellement dans une relation symbiotique qui pourrait être la clé pour nous aider à surmonter la crise à laquelle nous sommes actuellement confrontés. 

Beaucoup de post-it correspondent à des propos de Carl Sagan, qui est omniprésent dans l'essai. A plusieurs reprises, l'effet "wahou!" m'a propulsée en 1980 devant "Cosmos", quand j'avais  9 ans.


Europe, vu en 1979 par Voyager 2 (Cosmos) et en 2022 par Juno (A l'aube de nouveaux horizons)

L'émerveillement est resté le même, il va crescendo des missions spatiales passées aux ambitieux projets tout juste validés. Je suis certaine que Carl Sagan s'émerveillerait aujourd'hui en voyant passer Oumuamua [14] ou les promesses de Breakthrough Starshot. Il s'inquiéterait aussi pour les enfants contraints de rester enfermés à cause d'épidémies ou de canicules. 

A nous de ne pas transformer notre exploration en creepypasta [1]. 

Bonjour, 

Vous souhaitez vous sortir de votre quotidien morose ? 

Vous souhaitez partir à l'aventure et faire un voyage exceptionnel ?

Alors dans ce cas, prenez "A l'aube de nouveaux horizons" et... allez à la première page. Vous direz alors "Que l'aventure commence !"


  1. S. Piotelat, Creepypasta, Le voyage extraordinaire, 2016
  2. N A. Cabrol, A l'aube de nouveaux horizons, Seuil, 2023
  3. Critique du livre sur Babelio
  4. Tweet de @shasta721
  5. Nathalie Cabrol, la vie extra-terrestre, 28 minutes, 01/2023
  6. E. Ostashevsky "Le pirate qui ne connaissait pas la valeur de Pi" (critique), 2017
  7. "Le bois de Coin Joli : La grosse colère" (critique), 2017
  8. E. Piotelat, Autour de la mort, 08/2020
  9. E. Piotelat, Through the Moon, 10/2020
  10. E. PIotelat, La grâce et les ténèbres, 11/2020
  11. Riss, Une minute quarante-neuf secondes (critique), 2019
  12. N A Cabrol, Voyage aux frontières de la vie, 2021 (critique).
  13. E. Piotelat, Voyage aux frontières de la vie, 12/2021
  14. E. Piotelat, Rendez-vous avec Oumuamua, 12/2017

Commentaires

Nathalie FT a dit…
Ce billet est très riche, ce qui donne une idée de l'essai de Nathalie Cabrol aussi. Je suis impressionnée par les post it!
Comme critique je n'ai répertorié que de la fiction, tu me donnes des idées ;)
Elisabeth a dit…
J'ai lu beaucoup d'ouvrages scientifiques quand j'étais ado, et il me semble que certains étaient des best-seller. Je pense par exemple à ceux de Jean Heidmann, d'Hubert Reeves ou à la brève histoire du temps de S. Hawkings (enfin, pour ce dernier, il est possible que je ne l'aie pas vraiment lu, j'étais juste fière de l'avoir dans ma bibliothèque).

Je ne me souviens pas m'être posé une question du style "est-ce que c'est pour mon âge ?", ou en tous cas pas plus que pour un roman. Dans les deux types de livre, je découvrais du vocabulaire, et il me semble que les mots scientifiques (que l'on retrouve aussi dans la SF) ouvraient plus d'horizons...