Compter les mois, les saisons, m'aide à baliser le chemin parcouru. Notre vaisseau, la planète Terre, a déjà fait un tour du Soleil sans Sonia.
A l'instar du rouge-gorge qui a fait son retour dans l'if [1], ce second tour a un air de déjà vu.
Un peu comme on revient sur les lieux d'un voyage, l'anxiété, les petites et grandes angoisses sont moins intenses. Comment aborder Noël ? Avec un calendrier de l'avent [2] et quelques décorations.
Sonia le 20 décembre 2009 aux Ulis. |
Rechercher la vie dans un cimetière, l'observer au fil des saisons, est-ce lié à cette autre quête de vie dans l'univers ? Jusqu'à récemment, il me semblait évident que non, ou alors, j'aurais pu donner à une éventuelle liaison entre les deux une étiquette du style "Trouble obsessionnel compulsif lié à un intérêt précoce pour SETI après avoir regardé Carl Sagan ou Jean Heidmann dans l'enfance". Je viens de terminer le livre de Nathalie A. Cabrol "Voyage aux frontières de la vie" [6]. J'y ai retrouvé le même sens du merveilleux qui avait éveillé la curiosité de la petite fille que j'étais, qui se focalisait sur l'univers mais pouvait rester des heures à regarder les documentaires du commandant Cousteau ou d'Haroun Tazieff. J'ai passé l'automne à le lire, en m'interdisant de l'ouvrir à un autre moment que le samedi matin, histoire que le voyage dure le plus longtemps possible.
J'étais moi, mais j'étais aussi le lac, le volcan et l'univers. J'étais tout à la fois sans dimension et infinie. Jusqu'à ce moment, ma recherche avait été essentiellement centrée sur les caractéristiques de la vie et de ses signatures dans les environnements extrêmes et sur d'autres planètes. Quelque part, j'avais inconsciemment ancré dans mon esprit que la recherche sur la nature de la vie était du domaine des sciences humaines, une recherche que j'avais poursuivi en parallèle. En sortant de l'eau ce jour là, j'ai su que cette fusion que je venais de vivre au cœur du lac, devait aussi avoir lieu dans ma recherche. Il devint évident pour moi à cet instant que la communauté scientifique ne pouvait pas continuer à chercher la vie au-delà de la Terre sans concentrer le même niveau d'effort à essayer de comprendre sa nature et l'influence que nous avons sur ce que nous explorons.
Comme l'année dernière, j'ai forcé des bulbes en les mettant au frigo, puis en les sortant dès que les premières feuilles font leur apparition [9] . Les premières jacinthes ont fleuri cette semaine au chaud.
Lors du précédent tour du vaisseau autour du Soleil, la poésie d'Anna de Noailles fut comme un phare dans les ténèbres que je découvrais [10]. Parle-t-elle des jacinthes ? Oui, dans deux magnifiques poèmes du recueil "Les éblouissements" [11].
Ô sol humide et noir d'où jaillit la jacinthe !Qu'importe si dans l'âpre et ténébreuse enceinteLes morts sont étendus froids et silencieux ;Ô beauté des tombeaux sous la douceur des cieux !Marbres posés ainsi que des bornes plaintives,Rochers mystérieux des incertaines rives,Horizontale porte accédant à la nuit,Ô débris du vaisseau, épave qui reluit,Comme vous célébrez la joie et l'abondance,La force du plaisir, l'audace de la danse,L'universelle arène aux lumineux gradins !...- Et quelquefois, parmi les funèbres jardins,Je crois voir, ses pieds nus appuyés sur les tombes,Un Eros souriant qui nourrit des colombes.
Les jacinthes, molles et belles,Sont de somptueuses chandellesQui brûlent dans le gazon purLeur cire de pourpre et d'azur.
- E. Piotelat, Retrouvailles, 10/2021
- Calendrier de l'avent 2021.
- E. Piotelat, Semons des graines, 06/2021
- Observation des saisons - 2 novembre.
- Observation des saisons - 17 octobre
- N. A. Cabrol, Voyage aux Frontières de la Vie, Seuil, 09/2021 EAN 9782021465259
- E. Piotelat, A Sonia, 06/2020
- E. Piotelat, 12 mois, 06/2021
- E. Piotelat, Tulipe post-apocalyptique, 12/2020
- E. Piotelat, Une saison au..., 12/2020
- A. de Noailles, Les éblouissements.
- E. Piotelat, L'automne à Neverland, 09/2020
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