Ce 11 novembre, j'ai refait le chemin de Sonia en allant déposer une bougie place de la République à Paris, pour rendre hommage aux victimes des attaques terroristes du 13 novembre 2015.
Le mardi 17 novembre 2015, après les cours au collège de la Guyonnerie, Sonia avait pris le R.E.R. depuis Bures-sur-Yvette pour se rendre place de la République et y déposer une bougie. Elle m'en a parlé quelques jours plus tard, quand la sidération commençait à diminuer... ou peut-être en décembre, quand nous y étions retournées pour protester contre les lois liberticides. [1]
| Sonia dans le RER en Novembre 2015 |
Je ne me souviens pas lui avoir demandé ce qu'elle a ressenti pendant le trajet. Nous devions aller à Palaiseau la semaine suivante. Il y avait très peu de monde dans le wagon. Nous étions en état d'urgence et la méfiance allait de pair avec l'humanisme. Fluctuat Nec Mergitur...
Comme Sonia 10 ans plus tôt, j'ai déposé une bougie au pied de la statue, avec quelques grues, symboles de paix. En ce jour férié, il y avait beaucoup d'enfants, une rose blanche ou un bouquet à la main... Des parents affichaient des dessins à côté de la fameuse couverture de Charlie Hebdo "Ils ont les armes. On a le champagne", et un "Je suis Charlie" avec une écriture d'enfant.
Sonia qui adorait dessiner avait été marquée par les attentats de janvier 2015. Dans son collège, dans sa classe, il y avait des tensions, certains n'avaient pas respecté la minute de silence. Si en janvier, on pouvait énumérer les raisons, allant jusqu'à "Ils l'ont cherché", en novembre, ce n'était plus le cas [2]. Les cibles, c'était la génération avant Sonia, celle qui l'avait précédée dans son collège, celle qui vivait ses rêves d'indépendance et d'autonomie. Les cibles, c'était elle, c'était moi, qui allions de temps en temps à la terrasse des restaurants parisiens.
Après avoir flashé quelques Space-Invaders autour de la place, j'ai emprunté le boulevard Voltaire.
Je me suis arrêtée devant le Bataclan, pour déposer une toute petite bougie et lire les noms des victimes [3].
Comme à République, les hommages étaient nombreux. Les gens s'attardaient devant la salle de spectacle. Alors que nous étions aux Ulis, ce 13 novembre 2015, Sonia et moi n'étions sans doute plus tout à fait les mêmes après. Je me souviens avoir regardé les chaînes d'information très tard ce vendredi là. Sonia était dans sa chambre, elle dormait. Je ne l'ai pas réveillée. Le lendemain, je lui ai raconté.
Avec Sonia, nous avions testé les chouquettes en réponse aux attentats, après avoir vu la vidéo de John Oliver [4]. Puis, il y avait eu l'humour de la Katiba des Narvalos [5].
Le fait de déposer une bougie à République est égoïste. Je l'ai fait en pensant à Sonia, bien plus qu'aux victimes des attentats. Mais une nation, une union, c'est ça... Chacun, chacune apporte sa flamme, son bouquet, son histoire, ses cicatrices, ses blessures en évoquant le 13 novembre 2015. Tous les gestes individuels, individualistes, composent quelque chose de grand. C'est ça l'important !
- E. Piotelat, République, où es-tu ?, 12/2025
- E. Piotelat, Résilience, 09/2020
- Petite vidéo
- John Oliver Paris Attacks
- E. Piotelat, L'humour pour combattre Daesh, 12/2015








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