Rose

J'ai découvert la BD Rose un peu par hasard en feuilletant le journal de Spirou, après avoir remonté un carton de la cave [1]. Je l'avais commandé au Jardin de Thierry, mais la librairie a fermé [2]. Je me suis rabattue sur Terre de BD, la boutique préférée de Sonia. [3] L'intégrale datant de 2021, je ne m'inquiétais pas trop de ne pas recevoir de message m'indiquant que ma commande était disponible, puis en y allant, j'ai eu la joie de la récupérer, et de repartir avec au moins cinq ouvrages... Une librairie, c'est bien... 


Si les planches publiées dans Spirou m'ont attirée, c'est sans doute grâce aux couleurs rosâtres ou grisâtres à la fois douces et sombres. L'histoire commence avec le décès du père de Rose Klein. Elle découvre alors sa capacité à se dédoubler, à être spectatrice de sa propre vie. Par exemple, elle reprend son travail au musée. Ses collègues la voient triste, assise sur une chaise, et la comparent à un zombie. Son double se déplace derrière les visiteurs, entend toutes les conversations, s'en amuse. 

Le deuil c'est un peu ça : une hypersensibilité à tous les déclencheurs, qu'ils soient douloureux ou réconfortant, qu'ils se cachent dans des conversations banales [4] ou dans les branches d'arbre [5]. Même si Macron le veut pas, nous on est là [6], mais l'esprit est ailleurs. Là, où tour le monde voit une image bucolique, l'ombre, le double voit une autre photo. 

Sonia faisant brouter Isa en 2018

Ross Klein était détective privé et il a été assassiné. L'intégrale permet de suivre l'intrigue et de connaître le dénouement. On voit Rose se métamorphoser. La guide de musée devient elle aussi détective sur une affaire d'adultère que son père avait accepté. Il y a un côté fantastique, avec des fantômes et des sorcières. 

Si j'y ai trouvé des échos de mon propre deuil, l'histoire est pour tout public et se lit à plusieurs niveaux. Cet aspect est illustré quand Rose découvre un secret de famille qui était sous ses yeux dès le début. Le scénario est intelligent. 


Les dessins illustrent la fragilité et la force de Rose. On la voit évoluer au fil de son enquête, avec une détermination grandissante. En recherchant l'assassin de son père, c'est lui qu'elle recherche, et une part d'elle-même. La culpabilité, le pardon sont aussi au cœur de l'ouvrage. 

Si les sentiments de Rose sont mis en avant, l'histoire n'est pas triste, ni noire. Il y a beaucoup de passages drôles. Cette bande dessinée est une bonne manière d'aborder le deuil avec douceur. 



  1. E. Piotelat, Le journal de Spirou (30), 12/2022
  2. E. Piotelat, C'était le Jardin de Thierry, 01/2023
  3. D Lapière , É Alibert, V. Vernay, Rose l'Intégrale, EAN : 9791034759460
  4. E. Piotelat, Dix saisons, 03/2023
  5. E. Piotelat, Deuil et cerveau, 02/2022
  6. E. Piotelat, Monsieur le président, 01/2021

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