Neuf saisons

La neuvième saison au cimetière paysager de Bures-sur-Yvette s'achève. Comme il y a un an, elle est marquée par le retour du rouge-gorge [1]. Quand je regarde les miniatures de l'automne, j'y vois beaucoup plus de jaune qu'en 2021 [2]. Il y a actuellement un tournesol sur la tombe de Sonia. 

L'automne 2021/2022


Cette dernière saison a été incroyablement chaude. La température a dépassé les 20°C au mois d'octobre pendant plusieurs jours. Si j'ai trouvé des tournesols cette année au marché des Ulis mi-octobre [8], si j'en ai croisé par hasard en allant voir "Les Engagés" à Antony le 10 novembre [9] ou la allant papoter la semaine dernière à Floralidulis [10], il n'y a pas forcément de lien de causalité avec les températures élevées. La mondialisation, la difficulté de s'approvisionner en Ukraine, le succès de cette fleur aux multiples symboles contribue sans doute à sa présence fin décembre. 

Jusqu'à 23°C aux Ulis le 19 octobre 2022

Cette semaine, je me suis rendue compte que j'étais sexiste, que j'avais plein de présupposés. Tout a commencé par lappel d'une infirmière à rompre la solitude de  Marie-Micheline, Marcelle, Jean-Claude et  Marie-Annick vivant en Ephad en leur écrivant une lettre [3]. Inspirée par l'action de Yumi [4] auprès des personnes souffrant de démence, je me suis dit que je pourrais envoyer quelques origamis.  Comme les quatre destinataires sont dans le même établissement, autant envoyer des choses différentes et des petits mots variés au cas où ils comparent ce qu'ils reçoivent. 



Je n'ai eu aucun problème à écrire quelques chose de gentil pour les dames. Pour le monsieur, j'ai basculé en mode porc-épic. Le mot qui me venait à l'esprit était moins sympathique : 

"Je vous envoie un flocon de neige en origami pour vous rappeler que vous avez détruit la planète". 

Pourtant, je ne connais ce monsieur ni d'Eve ni d'Adam. Physiquement, il ne ressemble ni à Alain Finkelkraut, ni à Bernard Pivot, ni à Laurent Alexandre ou n'importe quel vieux con (dixit Yann Arthus-Bertand) ayant craché son venin sur une adolescente alertant sur l'urgence climatique.

Même si Sonia est décédée à cause de la canicule, je ne peux pas accuser Jean-Claude d'avoir envoyé plus de CO2 dans l'atmosphère depuis 1930 que Marie-Micheline, Marcelle ou Marie-Annick. Il est vrai que la probabilité qu'elles aient eu une voiture ou pris l'avion régulièrement est moindre. Ai-je été influencée par le calendrier de l'avant [5] et les combats de Sonia ?


Ai-je été énervée par les deux aller-retour à Doha faits par le président dans la même semaine, juste pour voir des matchs de foot ? C'est possible. Jean-Claude n'y est pour rien. Mes pré-supposés sont vraiment ancrés. Quand je vois la photo d'une femme âgée, je pense à Simone Veil ou encore Jeanne Goodall, c'est-à-dire que je suppose que c'est une personne sensible, intellectuelle, raisonnée. Quand c'est celle d'un homme en EPHAD, l'image de Jean-Marie Le Pen arrive bien avant celle du philosophe  Michel Serre ou du biologiste Albert Jacquard. 

Pourquoi ces présupposés, ces préjugés ? Ce n'est pas parce que quelques hommes détruisent la planète, qu'ils sont tous à mettre dans le même panier. Les balayer avec un contre-exemple n'aide pas à résoudre le problème :  "Je ne suis pas sexiste, j'ai un ami qui ne détruit pas la planète / j'ai une amie qui prend l'avion.". Est-ce juste une phobie des vieux cons (dixit Yann Arthus-Bertrand) aussi irrationnelle que la peur des chiens ? 

Sonia en 2013

Une fois cette prise (ou crise) de conscience passée, j'ai pu sans problème écrire un mot gentil à Jean-Claude. Le succès de l'appel de l'infirmière [3] a mis en lumière d'autres initiatives, comme "une lettre un sourire" [7]. L'avantage est que l'on doit choisir d'écrire à un homme ou à une femme que l'on ne connait pas.

J'ai naturellement écrit à une femme, mais si on tient compte de la participation des seniors aux diverses élections, il serait peut-être plus judicieux d'essayer d'influencer un clone de Le Pen, Finkelkraut, ou Alexandre en leur envoyant une photo de fleur pour qu'ils soient moins aigris et pensent à la biodiversité ? Préjugé, quand tu nous tiens. Ça pourrait être l'occasion de véhiculer les idées de Sonia, de Greta Thunberg et de tant d'autres jeunes filles et garçons dans l'esprit de ceux que Michel Serre appelait les "grands papas ronchons" ?

jacinthes, orchidée et tournesols de décembre

Ajout le 23/12 : 

L'EPHAD reçoit près de 2000 lettres par jour... [11]

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