Evo-SETI : préface

J'ai commencé à lire le dernier ouvrage de Claudio Maccone, "Evo-SETI, Life Evolution Statistics on Earth and Exoplanets "[15]. Mes fonctions cognitives ayant été dégradées le 26 juin dernier [1], je suis incapable de le juger, de dire ce qui est intéressant, ce qui est juste, ce qui est faux. Si Sonia m'avait donné le titre de "pire prof de maths de l'univers", c'est pour une bonne raison. Même si j'avais le niveau pour appréhender vraiment les calculs du mathématicien, partager ce que j'ai compris serait peine perdue... Ayant grandi avec la mathématiques modernes de Grothendieck [2], je vais remplacer les courbes par des origamis.


L'ouvrage fait près de 900 pages, je ne vais pas attendre de l'avoir terminé pour en parler. La préface ressemble à un résumé. Après l'avoir lue, il me semble que cet ouvrage est important, pour SETI, mais aussi pour comprendre la période que nous traversons. 

La croissance exponentielle (du nombre d'espèces sur Terre)

Alors que l'on s'inquiète de la sixième extinction de masse, Claudio Maccone montre que le nombre d'espèces sur Terre augmente de manière exponentielle.  Ça fait un an que l'on parle de croissance exponentielle du nombre de cas de SARS-COV2 (et j'aime pas les exponentielles) [3].

La vie est apparue sur Terre il y a 3,5 milliards d'années. Il y avait une cellule, un petit bout de papier (la pire prof de maths de l'univers signale que e0=1, ou 20 = 1 ).


Puis il y a eu 2 cellules (la pire prof de maths de l'univers signale que  21 =  eln(2) = 2  ) :


Puis 4, 8, 16... (la pire prof de maths de l'univers indique que  22 , 23 , 24 ) :




Une croissance exponentielle, ça commence toujours très doucement. C'est pas parce qu'il y a eu 1 cas de COVID de plus que la veille, puis 2, puis 4, puis 8 que l'épidémie ralentit. Même si 8 c'est pas beaucoup, c'est le double de la veille, donc c'est une croissance exponentielle. 

On peut ainsi continuer : 32,  64, 128 (la pire prof de maths de l'univers indique 25 , 26 , 27 ) :


On peut prendre une feuille de papier, la plier en 2, puis en 2, puis en 2... pour se rendre compte de ce que représente une croissance exponentielle. Très vite, le pliage devient impossible. 

Ça reste des mathématiques, donc ça ne correspond pas exactement à la réalité. Par exemple, le nombre d'espèces vivantes à un instant "t" sur Terre n'est pas un point d'une exponentielle. L'exponentielle est une sorte de moyenne de ce que l'on appelle un mouvement brownien. Avec le changement climatique, le nombre d'espèces diminue sur Terre depuis quelques dizaines d'années, cela fait un point en-dessous de l'exponentielle, mais sur 3,5 milliards d'années, ça ne se voit pas [4]. 

Evolution et SETI (Evo-SETI) ? 

La formule de Drake prend en compte la durée de vie d'une civilisation [5]. Pour que l'on puisse recevoir un signal, une signature technologique, il faut que quelque part dans l'univers, il y ait une étoile (le Soleil), puis des planètes (comme Mars), avec un écosystème (des tournesols), de la vie (une libellule) puis de l'intelligence capable de développer une technologie. Enfin, il faut que cette capacité dure assez longtemps. Par exemple, si les humains avaient disparu juste après avoir développé la bombe H, on ne risquait pas de communiquer avec d'autres êtres intelligents. 


Sur Terre, des empires, des civilisations sont apparus, ont connu une apogée et ont disparu. En 2017, j'ai découvert cela à Milan, lors de SETI Italia [6]. Sonia était présente. Officiellement, elle était en stage d'observation pour la SETI League afin de prendre des photos. 

Photo de groupe (SETI League. Claudio Maccone)

Claudio Maccone a présenté un exposé avec plein de formules mathématiques qui dépassaient largement le niveau de l'élève de seconde qu'était Sonia, mais elle en a conclu qu'elle n'avait plus besoin d'assister aux cours histoires, puisque le grand mathématicien qu'elle venait de rencontrer avait tout mis en équation [8]. En revanche, elle devait choisir une orientation où elle étudierait les mathématiques (et pas avec la pire prof de maths de l'univers). 

Photo de Claudio Maccone prise par Sonia

Pour la Grèce Antique comme pour l'empire colonial Français, on entre des paramètres, que sont les dates de naissance b (600 ans avant notre ère ou en 1524 quand Jean de Verrazane arrive à New York pour François 1er), l'âge de sénilité s (mort d'Alexandre le Grand ou défaite de Napoléon à Waterloo), l'âge de la mort d (celle de Cléopâtre ou l'indépendance de l'Algérie) et la date du pic p (Periclès, la démocratie et les sciences en Grèce ; la conquête du Québec ou des Indes pour l'empire Français). A partir de ces 4 paramètres, on peut tracer une courbe (la pire prof de math de l'univers parlerait de loi lognormal [9] qui commence à 0 mais Claudio Maccone commence la courbe à b et donc parle de loi b-lognormal).

La vie comme une distribution

La naissance, le pic d'activité (fécondité, sport, connaissances, etc... entre 30 et 40 ans), la sénilité (ok boomer) et la mort, ça marche aussi pour un être humain. Quand j'ai vu la courbe dans la préface, mon cerveau qui tend vers la sénilité a fait un "non" en pensant à Sonia... 


Et puis après quelques secondes d’ébullition, je me suis dit que si l'on remplaçait "sénilité" par un mix "covid19 - canicule - changement climatique" ça pourrait correspondre à une loi 2002-lognormal. Si chaque module d'origami représente une certaine quantité d'évolution de Sonia dans sa courte vie, on peut dire qu'elle a atteint son pic soit en juillet 2019 quand elle a eu son bac, soit en janvier 2020 à la fin du premier semestre à l'université. Elle n'a jamais su, compris, réalisé tant de choses. Puis avec le confinement, les cours en ligne, elle a eu l'impression (qui était peut-être fausse) de régresser : des canicules de plus en plus fréquentes qui la fragilisaient, moins d'émulations avec des travaux pratiques, des échanges avec d'autres étudiants, etc... 

Peu importe la raison de sa mort -suicide ou accident-  elle était déjà sur la tangente entre le pic et la mort, comme sans doute beaucoup d'étudiants qui se voient dépérir au fil des jours à un âge où le nombre d'interactions sociales, les nouvelles connexions neuronales, les performances sportives ne devraient cesser de croître. 

Depuis quelques mois, Sonia se moquait de moi en disant "C'est vrai que tu es une personne âgée maintenant" (donc je vais faire la vaisselle, les courses, ou t'envoyer un sms pour savoir si tu vas bien, etc...) . Je ne me suis pas rendue compte qu'avec la crise sanitaire, elle se sentait aussi sans doute plus vieille que les résidents des Ephad qui mourraient les uns après les autres. 
 

Nous survivrons ! 

Claudio Maccone démontre que l'entropie a augmenté de manière linéaire au cours des 3,5 milliards d'années (la pire prof de math de l'univers corrige en disant qu'il s'agit de l'entropie de Shannon [10] qui mesure l'information). Si on traduit ça en origami, on a besoin de plus d'information pour fabriquer un dragon [11] ou un pingouin [12] composé de 500 modules, que pour fabriquer un œuf de 100 modules [13] que pour fabriquer un seul module il y a 3,5 milliards d'années. 


En citant Joan Baez, il nomme son théorème "Overcome theorem". Les civilisations s'éteignent, mais elles sont remplacées par d'autres civilisations, plus complexes, qui nécessitent plus d'information pour les décrire, et qui manipulent plus d'informations aussi. Les pics successifs se situent sur une exponentielle. Bref, il y a de quoi être optimiste pour la réception d'une signature technologique... 

A suivre (il me reste 820 pages à lire)...

Commentaires

Emmanuelle a dit…
Bon, moi, j'ai relevé une erreur dans ton cours d'origamath...
Le pire prof de math de l'univers, je le connais, je l'ai eu en terminale et... c'était pas toi !
Elisabeth a dit…
Je suis déçue... J'étais très fière de ce titre (qui sous-entendait que j'étais quand même "un peu" prof de maths). Pour motiver Sonia, je lui avais dit que si elle avait la moyenne en maths au bac, je passais le CAPES de maths "pour le fun".