Membre à vie de la SETI League

Hier soir, j'ai trouvé dans ma boîte aux lettres une enveloppe venant des USA. A l'intérieur, j'ai eu la surprise de découvrir un diplôme qui m'a fait extrêmement plaisir : je suis membre à vie de la SETI League, inc [1].

Diplôme de membre à  vie de la SETI League devant affiche du film contact

Recevoir des signaux venant d'au-delà de notre planète changera pour toujours notre vision de la place de l'humanité dans le cosmos. Reconnaissant cela, la SETI League, Inc envisage un réseaux de milliers d'expérimentateurs et d'expérimentatrices, travaillant ensemble pour accélérer notre entrée dans la communauté galactique.

Soutenant cette vision, Elisabeth Piotelat est ainsi nommée membre à vie de la SETI League, Inc


C'est quoi déjà la SETI League ? 

Pour fêter les 500 ans de la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb, la NASA a lancé en 1992 un projet appelé HRMS : Hight Reslution Microwave Survey. Certains murmurent que la véritable signification est « He Really Means SETI », et le projet HRMS était plus connu sous la dénomination « Projet SETI de la NASA ». Le Congrès américain a mis fin au financement du projet fin 1993. Cependant, les scientifiques ont pu conserver leurs équipements et poursuivre la recherche sous l'égide du SETI Institute.

Suite à l'abandon du projet SETI de la NASA, deux radio-amateurs, Paul Shuch et Richard Factor ont créé une association à but non lucratif : la SETI League. Pour eux, SETI est quelque chose de trop important pour être laissé entre les mains de politiciens, qui ont réduit le déficit fédéral de 0,0006% en mettant fin au projet. Les grands projets gouvernementaux prennent plus de temps, coûtent plus chers et fonctionnent moins bien.

En 1996, la SETI League a lancé le projet Argus. L'idée était d'avoir 5000 petits radiotélescopes à travers le monde afin d'obtenir une couverture totale du ciel, un peu comme les astronomes amateurs peuvent repérer des comètes à l'aide de jumelles quand les grands télescope vise ailleurs. A l'époque, les américains cherchaient à se débarrasser de leurs vieilles antennes satellite de 10 mètres de diamètre [2].

Antennes du projet Argus

Aujourd'hui, l'association compte 1500 membres dans une soixantaine de pays et une centaine de stations Argus.    

La SETI League en France

J'ai découvert l'existence de la SETI League en 1995. Le directeur exécutif, Paul Shuch a répondu avec enthousiasme aux nombreuses questions que j'avais. J'étais en stage à la station de radioastronomie de Nançay afin d'obtenir mon diplôme d'ingénieure. Pendant ces quelques mois, j'avais eu l'occasion de parler de SETI avec François Biraud qui avait mené des écoutes à Nançay en 1981 avec Jill Tarter [3].

L'association était représentée par Amanda Baker, qui a ensuite quitté Paris pour étudier l'évolution chimique de l'univers à l'université de Cardiff. Nous avions commencé par traduire certaines parties site web en français. A l'époque, il n'y avait pas d'I.A. pour faire le boulot et Google Trad ne sera lancé qu'en 2006. Nous nous étions vite rendues compte que la plupart des francophones qui s'intéressaient à SETI à l'époque ne lisaient pas ou peu l'anglais. 

En 1999, quand SETI@HOME est sorti, les seules pages html (c'était tout nouveau à l'époque) parlant de SETI en français étaient celles de la SETI League. Différents projets SETI avaient été popularisés par François Biraud et Jean Heidmann dans leurs livres et à la télévision, mais il n'était question jusque là ni de calcul distribué, ni de science participative.  

La SETI League en Europe

A part Amanda que j'avais croisé à Paris en 1996 ou 1997, je n'avais jamais rencontré physiquement de membres de la SETI League jusqu'en 2000, en Allemagne, au congrès européen de radioastronomie (ERAC) [4]. 

ERAC 2000. Photo de groupe
Photo de groupe Heppenheim, Germany (© SETI League)

Il y a eu d'autres rencontres, comme en 2008 lors de l'incroyable congrès à l'UNESCO. 

Membres de la SETI League à l'UNESCO
Photo de groupe des membres de la SETI League à l'UNESCO

Science citoyenne

A travers le monde, la plupart des personnes qui assistent aux conférences sur SETI le font à titre personnel, sans financement de leur université ou de leur institution, à part peut-être certains chercheurs de l'université de Berkeley ou du SETI Institute. Les scientifiques vont par exemple être spécialistes de sursauts rapides, de quasars, de pulsars, d'électronique, d'intelligence artificielle, de big-data, etc... tout en s'intéressant à la recherche de vie dans l'univers. 

La SETI League rassemble des amateurs aussi bien que des professionnels, ce qui donne lieu à des échanges enrichissants à tous les niveaux. C'est grâce à l'organisation que j'ai pu faire la connaissance de Claudio Maccone et découvrir l'Académie Astronautique Internationale, avant d'en être élue membre. [5]

Au fil des années, je me suis rendue compte que mon adhésion à la SETI League était une étiquette qui comptait pour moi, même s'il n'était pas rare que je me rappelle la veille de l'assemblée générale que j'avais oublié de la renouveler, comme l'année dernière (et l'année d'avant). 

C'est aussi une affiliation plus connue que des instituions françaises, comme lors du symposium SETI du congrès astronautique international [6] et qui m'évite de me demander si j'interviens à titre associatif ou non.

Présentation SETI et Origami

Membre à vie, c'est long ? 

Si je meurs la semaine prochaine, une ré-adhésion d'un an aura été plus longue que le fait d'être membre à vie. Il n'empêche que j'ai été extrêmement fière de recevoir ce diplôme d'une part, et d'autre part, rassurée. 

En 2022, j'ai fait la connaissance de Muriel Hykes, lors de la rencontre annuelle des membres qui s'était faite via Zoom. Je savais qu'elle avait un rôle important dans l'association, mais j'en ignorais l'ampleur. Elle est décédée le 28 juillet 2023 et je me demandais ce qu'allait devenir la SETI League. [7]

  

Réunion Zoom SETI League
2022 SETI League Annual Membership Meeting (Capture d'écran SETI League)

Le fait qu'il puisse y avoir des membres à vie est un gage de longévité aussi pour la recherche d'intelligence extraterrestre. On ne recevra peut-être pas de signal la semaine prochaine, autant qu'il reste des humains, amateurs ou professionnels à l'écoute pendant toute leur vie ! 



  1. Site web de la SETI League et version en français. 
  2. Site web du SETI Institute
  3. E. Piotelat, Il était une fois SETI à Nançay, 07/2018. 
  4. Second European Radio Astronomy Congress, 9 - 10 September 2000
  5. E. Piotelat, Le rêve de l'espace pour toutes, 09/2022 
  6. E. Piotelat, IAC 2022 : SETI au programme, 09/2022
  7. H.P. Shuch, Remembering Muriel Hykes, 08/2023


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