Dimanche dernier, j'ai vu le film Joker. J'ai envie d'en parler ici, mais je ne sais pas par quel bout le prendre tellement ce film m'a bouleversée. Mes impressions à la sortie ? Je ne me sentais pas très bien mais j'avais envie d'aller dire à tout le monde d'aller voir ce film extraordinaire.
Pourquoi ? Ce n'est pas la violence physique, les morts. Non... C'est peut-être la violence psychologique, l'impression d'être montée dans un train en entrant dans la salle, d'avoir fait deux heures de voyage, puis d'être ressortie différente.
A quel point ? Tout d'abord, le film m'a mise mal à l'aise. Pas au point d'avoir envie de me suicider, non... Il m'a déséquilibrée, un peu comme le Joker qui tombe, se redresse, danse, s’effondre.
Il est sorti en salle mercredi 9 octobre. J'avais entendu quelques éloges avant d'aller le voir, mais je n'avais pas regardé la bande annonce. [1]
Même si le métro a l'air vieux, il semble fonctionner mieux que le RER. Depuis la rentrée, c'est la catastrophe sur les lignes A, B, C, D. Par exemple, aujourd'hui, 17 octobre, à 12h09, on a appris qu'un accident électrique clouait le RER D à l'arrêt à la gare d'Evry. Le trafic a repris à 13h21, mais les ralentissements ont duré jusqu'à 14h51. A 17h09, un nouvel incident était annoncé sur le compte Twitter du RER D [3].
Le quotidien d'Arthur Fleck, c'est celui de beaucoup de banlieusards qui se croisent dans les ascenseurs sans vraiment se connaître.
J'adore jongler. Manifester, se présenter à une élection européenne, parler de SETI, n'est-ce pas aussi jouer la comédie ? A propos, Science et Vie vient de sortir un hors série intitulé "Et si..." dans lequel Léa Giret consacre 8 pages à la question "Et si nous étions contactés par des extraterrestres ?" [11]
Le Prix Nobel, n'est-ce pas aussi de la comédie ? J'ai été ravie qu'il soit attribué à Didier Queloz, Michel Mayor [7] et Esther Duflo [8].
La tragédie qu'est la vie d'Arthur Fleck se transforme en comédie quand il devient Joker, celui qui voit les choses avec détachement en devenant psychopathe. La vie des autres n'a plus de valeur.
"N'oublie pas de sourire", c'est ce que nous rabâchent aussi bien les chantres de la psychologie positive que ceux qui nient le réchauffement climatique. Une jeune fille se doit de sourire, qu'elle s'appelle Greta ou non. Et pourquoi si la réalité ne s'y prête pas ? Si elle n'en n'a pas envie ?
Ce sourire les doigts dans la bouche illustre parfaitement le malaise d'une société où il faut être dans la norme, joyeux, vendeur, acheteur comme si tout allait bien, comme si on n'avait pas le droit de dire que l'on ne se sentait pas bien...
Ce sourire, c'est aussi celui que l'on affiche sur les réseaux sociaux, où l'on joue la comédie. On est un personnage forcément différent de celui de la vraie vie.
A propos de Michaël Harpon, le terroriste de la préfecture, Libération nous apprenait le 6 octobre que ses collègues le surnommaient "Bernardo", comme le compagnon muet de Zorro. [5]
Todd Phillips, le réalisateur nous lie avec Arthur Fleck. Celui-ci n'est pas le méchant qui combat Batman mais le héros auquel on s'identifie. Il ne suffit que de deux heures pour que l'humain bascule, pour que le spectateur se dise que tuer des riches, ce n'est que justice. Et c'est peut-être ça qui déstabilise au plus haut point. Joker nous montre à quel point nous sommes faibles, prêts à nous rallier à des monstres pour n'importe quelle idéologie et à oublier la valeur d'une vie humaine.
Tout doit disparaître... Il suffit d'une arme pour cela.
La voisine d'Arthur Fleck, Sophie Dumond, qui restera celle qu'il a croisée dans l'ascenseur semble être la seule à pouvoir le retenir, le sortir de sa descente, l'empêcher de tuer. C'est par ses yeux lorsqu'elle découvre cet inconnu dans son salon que l'on comprend la folie qui habite Arthur, que l'on réalise que certaines scènes n'existent que dans la tête du héros. [6]
Une idée simple m'est apparue comme une évidence : pour éviter la radicalisation, il faut accepter la différence, tolérer l'autre.
Si ma voisine se voile, le lui reprocher ce changement de comportement est le meilleur moyen de la pousser à s'enfermer dans un islam encore plus radical.
Si mon voisin est homophobe et antisémite ne pas écouter ses arguments est la meilleure manière de ne pas l'amener à avoir un avis plus modéré.
Le film Joker se déroule en période électorale. Il décrit une révolte prolétaire contre des riches candidats, comme Thomas Waynes. Dernièrement, j'ai vu passer #electaclownexpectacircus [9] à propos du retrait des troupes américaines en Syrie. Elisez un clown, attendez-vous à un cirque.
Hier, suite au droit de retrait exercé par les conducteurs SNCF, j'ai découvert ce que signifiait "EQUIPEMENT AGENT SEUL" ou EAS. Dans les TER qui en sont équipés, il n'y a plus besoin de contrôleurs pour vérifier la fermeture des portes. La caméra s'en charge.
Mercredi 16 octobre, un TER a heurté un convoi exceptionnel [10]. Le chauffeur, blessé, a effectué 1500m sur les rails pour éviter un sur-accident, en laissant seuls les 70 passagers. Et s'il y avait eu 1 mort, 2, 3, 70, les politiques et journalistes auraient-ils remis en question ce droit de retrait ?
Ce mercredi 16 octobre, les CRS ont violemment attaqué les pompiers, oui, ceux qui sauvent des vies, ceux qui sont en général les premiers à intervenir, ceux qui sont volontaires, ceux qui manquent de moyens.
C'est quoi ce cirque ?
Pourquoi ? Ce n'est pas la violence physique, les morts. Non... C'est peut-être la violence psychologique, l'impression d'être montée dans un train en entrant dans la salle, d'avoir fait deux heures de voyage, puis d'être ressortie différente.
A quel point ? Tout d'abord, le film m'a mise mal à l'aise. Pas au point d'avoir envie de me suicider, non... Il m'a déséquilibrée, un peu comme le Joker qui tombe, se redresse, danse, s’effondre.
Il est sorti en salle mercredi 9 octobre. J'avais entendu quelques éloges avant d'aller le voir, mais je n'avais pas regardé la bande annonce. [1]
Des Ulis à Gotham City
Même si le film se passe à New York dans les années 1980, l'environnement n'est pas loin de celui de la banlieue parisienne. Trois cadres harcèlent une jeune fille dans le métro. On pense à Harvey Weinstein, Jeffrey Epstein ou au Français Jean-Luc Brunel contre qui une plainte vient d'être déposée [2]. |
| Gare de Juvisy. |
Même si le métro a l'air vieux, il semble fonctionner mieux que le RER. Depuis la rentrée, c'est la catastrophe sur les lignes A, B, C, D. Par exemple, aujourd'hui, 17 octobre, à 12h09, on a appris qu'un accident électrique clouait le RER D à l'arrêt à la gare d'Evry. Le trafic a repris à 13h21, mais les ralentissements ont duré jusqu'à 14h51. A 17h09, un nouvel incident était annoncé sur le compte Twitter du RER D [3].
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| Gare d'Evry. |
N'oublie pas de sourire.
Au début du film, le métier d'Arthur Fleck, c'est clown. Moi aussi, quand j'étais petite et que l'on me demandait quel métier je voulais faire plus tard, il m'arrivait de répondre clown. Plus tard, j'ai rencontré Albator et j'ai changé de réponse. Je voulais construire des vaisseaux spatiaux. [4].
J'adore jongler. Manifester, se présenter à une élection européenne, parler de SETI, n'est-ce pas aussi jouer la comédie ? A propos, Science et Vie vient de sortir un hors série intitulé "Et si..." dans lequel Léa Giret consacre 8 pages à la question "Et si nous étions contactés par des extraterrestres ?" [11]
Le Prix Nobel, n'est-ce pas aussi de la comédie ? J'ai été ravie qu'il soit attribué à Didier Queloz, Michel Mayor [7] et Esther Duflo [8].
La tragédie qu'est la vie d'Arthur Fleck se transforme en comédie quand il devient Joker, celui qui voit les choses avec détachement en devenant psychopathe. La vie des autres n'a plus de valeur.
"N'oublie pas de sourire", c'est ce que nous rabâchent aussi bien les chantres de la psychologie positive que ceux qui nient le réchauffement climatique. Une jeune fille se doit de sourire, qu'elle s'appelle Greta ou non. Et pourquoi si la réalité ne s'y prête pas ? Si elle n'en n'a pas envie ?
Ce sourire les doigts dans la bouche illustre parfaitement le malaise d'une société où il faut être dans la norme, joyeux, vendeur, acheteur comme si tout allait bien, comme si on n'avait pas le droit de dire que l'on ne se sentait pas bien...
Ce sourire, c'est aussi celui que l'on affiche sur les réseaux sociaux, où l'on joue la comédie. On est un personnage forcément différent de celui de la vraie vie.
Radicalisation en 2h top chrono
Le film est-il long ? Non. Je n'ai pas vu le temps passer. Il débute sur une agression banale dans la rue. Ça ressemble à du harcèlement scolaire. Une bande de jeunes volent la pancarte d'un clown et le frappent avec. N'importe quel chef d'établissement dirait que ce n'est rien du tout, que c'est de la faute de la victime, etc, etc... Et on a aussi ce discours : "Pourquoi est-ce que tu ne les a pas laisser te prendre la pancarte ?"
A propos de Michaël Harpon, le terroriste de la préfecture, Libération nous apprenait le 6 octobre que ses collègues le surnommaient "Bernardo", comme le compagnon muet de Zorro. [5]
Todd Phillips, le réalisateur nous lie avec Arthur Fleck. Celui-ci n'est pas le méchant qui combat Batman mais le héros auquel on s'identifie. Il ne suffit que de deux heures pour que l'humain bascule, pour que le spectateur se dise que tuer des riches, ce n'est que justice. Et c'est peut-être ça qui déstabilise au plus haut point. Joker nous montre à quel point nous sommes faibles, prêts à nous rallier à des monstres pour n'importe quelle idéologie et à oublier la valeur d'une vie humaine.
Tout doit disparaître... Il suffit d'une arme pour cela.
La voisine d'Arthur Fleck, Sophie Dumond, qui restera celle qu'il a croisée dans l'ascenseur semble être la seule à pouvoir le retenir, le sortir de sa descente, l'empêcher de tuer. C'est par ses yeux lorsqu'elle découvre cet inconnu dans son salon que l'on comprend la folie qui habite Arthur, que l'on réalise que certaines scènes n'existent que dans la tête du héros. [6]
Une idée simple m'est apparue comme une évidence : pour éviter la radicalisation, il faut accepter la différence, tolérer l'autre.
Si ma voisine se voile, le lui reprocher ce changement de comportement est le meilleur moyen de la pousser à s'enfermer dans un islam encore plus radical.
Si mon voisin est homophobe et antisémite ne pas écouter ses arguments est la meilleure manière de ne pas l'amener à avoir un avis plus modéré.
Acte 49 des Gilets Jaunes
Aujourd'hui, samedi 19 octobre, c'est l'acte 49 des gilets jaunes. Cela fera bientôt un an que la protestation a commencé autour de quelques ronds points. Les pauvres sont toujours aussi pauvres. La situation a empiré en France mais aussi ailleurs dans le monde.Le film Joker se déroule en période électorale. Il décrit une révolte prolétaire contre des riches candidats, comme Thomas Waynes. Dernièrement, j'ai vu passer #electaclownexpectacircus [9] à propos du retrait des troupes américaines en Syrie. Elisez un clown, attendez-vous à un cirque.
Hier, suite au droit de retrait exercé par les conducteurs SNCF, j'ai découvert ce que signifiait "EQUIPEMENT AGENT SEUL" ou EAS. Dans les TER qui en sont équipés, il n'y a plus besoin de contrôleurs pour vérifier la fermeture des portes. La caméra s'en charge.
Mercredi 16 octobre, un TER a heurté un convoi exceptionnel [10]. Le chauffeur, blessé, a effectué 1500m sur les rails pour éviter un sur-accident, en laissant seuls les 70 passagers. Et s'il y avait eu 1 mort, 2, 3, 70, les politiques et journalistes auraient-ils remis en question ce droit de retrait ?
Ce mercredi 16 octobre, les CRS ont violemment attaqué les pompiers, oui, ceux qui sauvent des vies, ceux qui sont en général les premiers à intervenir, ceux qui sont volontaires, ceux qui manquent de moyens.
C'est quoi ce cirque ?
Divertissement
Ce qui m'a peut-être le plus bouleversée, c'est l'image de la mère, collée au show médiatique "Live! With Murray Franklin", comme des personnes âgées sont aujourd'hui scotchées à Naguy, Patrick Sébastien, ou Michel Drucker. Comment ces vieux bourgeois peuvent-il avoir un tel succès ?
Murray Franklin, joué par Robert De Niro, est à l'image des septuagénaires qui crachent sur les jeunes aujourd'hui, en rejetant leurs cultures (encore la faute aux écrans), en ayant des propos racistes (mais en ajoutant que non, ils ne le sont pas, pourquoi prendre leurs dires comme ça ?) ou en ne comprenant pas leurs combats. Et d'ailleurs comment pourraient-ils lire le rapport du GIEC, eux qui ne parlent pas un mot d'anglais ? Comment pourraient-ils comprendre les courbes mathématiques, eux qui n'ont que le certificat d'étude en poche.
Le film met une claque à cette génération là, et qu'est-ce que ça fait du bien, même si c'est celle de nos parents !
Alors oui, il faut que tout le monde aille voir Joker. Cette image crue de la société, ce dialogue avec nous-même est douloureux, mais tellement bénéfique !
- Joker Le Film
- Affaire Epstein : plainte pour harcèlement sexuel déposée contre Jean-Luc Brunel, Le Monde.
- Compte Twitter RER D.
- E. Piotelat, Parcours chaotique, 04/2018
- C. Pilorget-Rezzouk, Mickaël Harpon, «discret» ennemi de l’intérieur, 10/2019
- Film Theory: Joker Ending Explained (ft. Pitch Meeting)
- Hervé Dole, Le Prix Nobel de physique 2019 récompense une nouvelle vision de l’univers, The Conversation, 10/2019
- Esther Duflo, Social experiments to fight poverty, TED 2010.
- #electaclownexpectacircus
- Ardennes : collision entre un convoi exceptionnel et un TER à un passage à niveau, France 3 Grand Est, 10/2019
- Science & Vie Hors Série, Et si..., 09/2019
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