Elus et poubelles.

Je suis une femme, j'habite les Ulis, donc forcément, je ne comprends pas tout. Par exemple, en ce moment, maintenant, oui, tout de suite, j'ai un problème de poubelles. Depuis le 2 novembre, elles sont ramassées aléatoirement.


Pendant ce temps, à Orsay, sur l'affichage administratif, y'a des choses que je ne comprends pas non plus. Oui, bon, j'habite les Ulis, ça ne me concerne pas...


Mais quand même, Monsieur Villani est aussi mon député. Pourquoi est-ce qu'il a une réunion de travail au Vatican ? C'est pour les poubelles ? Ou a-t-il mis la laïcité à la poubelle ? Et le maire d'Orsay, ça le dérange pas d'afficher ça à côté d'un "avis d'enquête publique unique" ?


Mais revenons à nos poubelles. Pour la maire des Ulis, le problème de santé, ce n'est pas la salubrité de la ville, c'est les écrans, et tout l'argent que l'Essonne va dépenser pour fliquer l'utilisation des portables chez les parents d'enfants de maternelle [1].

Y'en a qui ont essayé de lui exposer ce problème lors du conseil municipal vendredi dernier. Mais les échos sur les réseaux sociaux montrent qu'il n'y a pas eu d'écoute [2].

Y'en a qui ont essayé d’interpeller hier soir le conseil de la Communauté Paris Saclay (CPS pour les intimes). Comme le relate le blog des citoyens actifs et solidaires (CAS) d'Orsay, on s'est bien moqué d'eux [3]. 

Je suis une femme, j'habite les Ulis, je n'ai pas de réunion de travail au Vatican, mais j'ai essayé de comprendre quelles étaient les règles du jeu puisque la maire s'en fiche et que le député interroge Dieu sur l'intelligence artificielle (ou l'inverse). 


But du jeu : se débarrasser de 95 pions.

Il y a 95 pions employés par le SIOM (Syndicat Mixte des Ordures Ménagères de la Vallée de Chevreuse) pour ramasser les poubelles de 21 communes et de 20500 habitants [4].
Comme cela coûte trop cher, surtout s'ils ont de l'ancienneté, il faut se débarrasser d'eux.

Les 4 joueurs : SEPUR, CPS, CCHVC,  Naldéo

Le SIOM est constitué entre la CPS et la CCHVC. C'est marqué dans les statuts [5].

Il y a donc un bureau syndical, présidé par le maire de Bures-sur-Yvette [6]. J'en ai déjà parlé sur ce blog, c'est le mec aussi narcissique qu'un adolescent qui adore se prendre en photo en trafiquant les résultats scolaires. [7]


En revanche, toujours d'après l'excellent blog du CAS [8], les élus du SIOM ne sont pas fichus de rédiger un appel d'offre, et doivent faire appel à une "assistance à la maîtrise d’ouvrage", en l'occurrence la société Naldéo.

Le quatrième joueur, la société SEPUR, doit obtenir l'appel d'offre et virer tous les salariés avec l'aide des trois autres joueurs. 

Les règles du jeu

  • Début de partie : Naldéo nomme un chef de projet, chargé de mission auprès du SIOM. [8]
  • SEPUR fait alors des offres à cette personne, afin d'obtenir le marché du ramassage des poubelles pendant 8 ans. [8]
  • Si le chef de projet accepte les pots de vins et la promesse d'embauche, alors le SIOM attribue le marché à SEPUR. [8]
  • Le chef de projet rejoint la société SEPUR [8]
  • SEPUR propose des contrats de travail aux 95 pions, de telle sorte qu'ils se mettent en grève (le 1er novembre). 
  • SEPUR retire les camions des ouvriers et les donne à ses intérimaires. 
  • De temps en temps, un camion blanc "SEPUR" passe dans les 21 communes, afin de ramasser quand même les poubelles.
  • Comme il y a un conflit social, SEPUR ne respecte pas les conditions de l'appel d'offre. Le même camion vide le contenu des poubelles jaunes et mauves, et rien n'est incinéré. [9]
  • Le SIOM pourrait exiger des pénalités, mais ne le fera pas et n'affichera aucun élément sur son site (appel d'offre, etc...), si ce n'est une lettre bateau destinée aux habitants [10

Fin de la partie 

La partie s'achève lorsqu'il n'y a plus aucun pion sur le plateau, c'est-à-dire quand les 95 ex-salariés ont quitté le jeu sans avoir signé leur nouveau contrat de travail. 


Si j'avais un gilet jaune, j'irai peut-être faire semblant d'écouter Dieu le 6 décembre prochain afin de parler de recyclage, d'écologie, de tri des déchets à un député...


Je pourrais aussi lui demander si ce sont nos impôts qui ont payé son voyage au Vatican pour sa mystérieuse réunion de travail... 

S'il me répond par l'affirmative, je pourrais lui demander pourquoi mes impôts ne sont pas mieux utilisés. C'est peut-être plus important de rémunérer le gars qui ramasse les poubelles que la société Naldéo, d'autant plus qu'avec un peu de machine learning, ça doit être facile de rédiger un appel d'offre. 

Il me répondra sans doute que je suis une femme, j'habite les Ulis, donc forcément, je ne comprends pas tout. C'est flou dans ma tête. Il n'empêche que j'ai cette désagréable impression que nos élus se fichent vraiment de nous... De gauche à droite, de l'Assemblée Nationale, jusqu'à la CPS en passant par les mairies, j'ai l'impression qu'ils sont tous dans le même bac, et pas celui des déchets à recycler.


Ajouts le 30/11 à 16h30 :

Villani est député;  aucun député n'a de pouvoir officiel de coercition sur les responsables de cette situation et Villani n'a pas de pouvoir d'influence puisque les acteurs en responsabilités ne sont pas de son bord politique...
(Remarque de David D sur la liste Urgence-Saclay [11]).

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ATTAC Nord-Essonne a répondu présent à la mobilisation en soutien des éboueurs du SIOM ce soir 28/11/2018 au Conseil communataire (ORSAY) !

Vous trouverez quelques photos (fichier compressé zip) de l'imposante mobilisation au Conseill communautaire du 28/11/2018 [12]  ainsi que la brillante intervention (en mp3) de Steeve Avisse (délégué CGT) [13].
Les élus communautaires ne pourront pas ou plus dire qu'ils ne savaient pas !

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Le tri sélectif : mode d'emploi 

15:18:51 On ramasse les poubelles mauves
15:19:06 On laisse la poubelle jaune
15:22:38  Au rond-point suivant, on ne prend que la poubelle jaune


  1. Voir la vidéo du petit ZPL à la fin du billet précédent : Famille, écran, Essonne.
  2. Mme Marhuenda Maire des Ulis refuse d'écouter les travailleurs du SIOM
  3. La lutte des salariés du SIOM, « ce n’est pas un jeu »...
  4. SIOM : Le territoire.
  5. SIOM : Les statuts.
  6. SIOM : Bureau syndical
  7. Brevet des collèges.
  8. Conflit social au SIOM : y-a-t-il du déchet parmi nos élus ?
  9. Incinération et valorisation des déchets.
  10. SIOM : Lettre aux habitants.
  11. Liste Urgence Saclay.
  12. Photos (fichier zip) partagées par ATTAC Nord Essonne.
  13. Intervention de Steeve Avisse 

Commentaires

Isa Mo a dit…


Je suis une femme, j'habite Palaiseau et je suis dans le même état d'incompréhension que vous ! Comme vous, j'ai bien compris les règles de ce jeu absurde, et je n'y adhère pas. Je suis sans doute mauvaise joueuse.
Qu'est-ce qu'on peut faire pour ces problèmes de poubelles et pour soutenir les éboueurs ?
Francis VALENTI a dit…
Merci pour cet article distancié et empathique à la fois.
Votre regard sur Jean-François Vigier, président du SIOM et fervent adepte des marchés publics et des DSP dans sa commune de Bures-sur-Yvette, dit combien vous avez compris le personnage.

Cela dit, hier, les éboueurs ont reçu leur premier bulletin de paie de SEPUR: on peu y lire en bas de page "Net à payer avant impôt sur le revenu: -25,79€". Avec les Buressois Unis et Solidaires (BUS) nous allons relancer la solidarité avec nos éboueurs.

A suivre ici: https://www.facebook.com/BuressoisUnisEtSolidaires/ ou ici: https://www.facebook.com/francis.valenti.56

Bien cordialement,
FV